OPERATEURS DE COMPETENCES : LES GRANDES MANŒUVRES COMMENCENT

Avec la réforme de la formation professionnelle, une dizaine d’opérateurs de compétences pourraient se substituer à la vingtaine d’Opca existants. Mais cette réorganisation par filière comporte encore des inconnues. Le mercato promet d’être animé.

C’est une période sujette à toutes les inquiétudes et propice à tous les scénarios possibles. En annonçant le regroupement des Opca en « filière économique cohérente », Muriel Pénicaud, la ministre du travail, a semé le trouble au sein des structures paritaires, renommés au passage opérateurs de compétences.

Car la notion de filière économique n’existe pas en droit. « C’est un Ovni juridique », pointe Jean-Marie Luttringer, directeur de JML Conseil et expert en droit de la formation. Ce sont les branches professionnelles qui désignent, par accord, l’Opca vers lequel les employeurs du secteur doivent verser leur contribution légale. Les Ocpa interprofessionnels (au nombre de deux) accueillent, eux, les entreprises des branches qui n’ont pas désigné d’Opca ou les entreprises non couvertes par un accord de branche désignant un Opca. « Il y a donc un conflit de logique entre la notion économique de filière et la notion « sociale » de champ d’application d’un accord collectif ». Ces nouvelles structures ne seront plus issues de la négociation collective de branche.

Périmètre d’intervention

Reste ensuite à définir leur périmètre d’intervention. Et là encore, les choses se compliquent. Car si certains Opca, à l’instar d’Opcaim pour les industries de la métallurgie, d’Opcalim pour l’alimentaire, du Fafiec (conseils et services informatiques) ou de Constructys (pour le bâtiment) revendiquent une unité de métiers, d’autres, à l’instar de l’Opca transports-propreté ou d’Uniformation (habitat social, protection sociale, économie sociale) ressemblent davantage à un agrégat de compétences.

Un marché des transferts animé

Autant dire que ce marché des transferts est susceptible d’être animé. Car certains devront se résigner à lâcher quelques secteurs quand d’autres devraient se réjouir d’accueillir de nouveaux métiers. Certaines professions étant disséminées dans différents Opca. A titre d’exemple, « bouchers et charcutiers ne sont pas dans le même Opca, les assureurs sont dans trois Opca différents, Saint-Gobain n’est pas avec le verre », a pointé Muriel Pénicaud, le 15 mars, lors d’un échange avec l’Association des journalistes de l’information sociale (Ajis). Idem pour la banque. Si la plupart des entreprises du secteur dépendent d’Opcabaia, les mutuelles sont regroupées au sein d’Opcalia et les Caisses d’Epargne ont trouvé refuge à l’Agefos-PME.

Or, « comment réfléchir aux métiers de demain si ceux qui font le même métier ne sont pas au même endroit pour en discuter ? », s’interroge la ministre. « Nous allons avoir des échanges branchés », sourit Yves Hinnekint, directeur général d’Opcalia.

Le mercato vient de débuter. Les concertations, qui devraient prendre davantage la forme de bilatérales, s’accéléreront une fois la loi adoptée et se poursuivront jusqu’à fin 2019. L’objectif est de parvenir à une cartographie de filières en 2020. La vingtaine d’Opca, les Octa (collecteurs de la taxe d’apprentissage) et les même Opacif pourraient ainsi être remplacés par une dizaine d’opérateurs de compétences. A charge pour les opérateurs de « faire le travail de terrain », faute de quoi le gouvernement pourrait reprendre la main et imposer des regroupements.

Quid des contributions conventionnelles et volontaires ?

Mais ce mouvement, quasi concomitant à la restructuration des branches, comporte encore de nombreuses inconnues. La première interrogation porte sur les contributions volontaires et conventionnelles de branches et d’entreprises, collectées jusqu’ici par les Opca. Demain, ces contributions seront-elles transférées à l’Urssaf comme les contributions légales ou resteront-elles à la main des opérateurs de compétences ? Ces coups de pouce financiers, octroyés en fonction des priorités des politiques de formation de branche, ne sont pas négligeables. D’autant qu’avec une valorisation de l’heure à 14,28 euros, les projets de formation, via le compte personnel de formation, pourraient être revus à la baisse. Notamment pour les stages débouchant sur l’acquisition du permis de conduire ou les certifications en langues étrangères souvent « boostés ». « La prise en charge de l’heure de formation équivaut à environ 50 euros pour le CPF », constate Yves Hinnekint. « Nous finançons au coût réel dans la limite d’un plafond à 50 euros, complète Joël Ruiz, directeur général d’Agefos-PME. Y compris les frais annexes, l’hébergement, le déplacement et la restauration ». Privés d’abondement complémentaire, la crainte d’un CPF moins-disant se profile. Avec à la clef, le risque de voir se développer une offre de formation « tablette », un organisme remettant au stagiaire une tablette ou un ordinateur, sans aucun cours en présentiel… Voire « d’un reste à charge important pour l’entreprise dans le cas d’une co-investissement CPF », poursuit Joël Ruiz.

Au sein d’Agefos-PME, une quinzaine de branches sur 50 ont une politique de contributions conventionnelles. Au sein d’Opcalia, cinq à huit (sur 31) octroient des coups de pouce. Au total, un tiers des branches prévoient des cotisations additionnelles au CPF, selon une étude de l’observatoire Fidal de 2016.

« Interpro » ou « interbranche » ?

Autre inconnue : quid de l’interprofessionnel ? Si certains observateurs  prédisent leur disparition, d’autres, à l’instar de Jean-Marie Luttringer, rétorquent, que ces Opca ne relèvent déjà plus d’une logique interprofessionnelle mais « interbranches », comportant d’ores et déjà des stratégies de regroupement.

Par ailleurs, quelle sera la méthode retenue pour amorcer ce mouvement ? Ira-t-on vers une cohérence de filières en termes de métiers ou en fonction de besoins en formation et compétences ? En clair, avancera-t-on vers un regroupement de métiers ou de techniques communes de formation ?

Sans compter les risques « de casse sociale », prédit un observateur. Les syndicats sont inquiets de la perte des effectifs. 6 000 personnes travaillent actuellement au sein des Opca, des Opacif et des Octa, Certains redoutent une perte de la moitié de ces postes.

Même si, nuance, Yves Hinnekint, « la collecte n’est pas le cœur de métier de l’Opca. Elle représente, pour Opcalia, 0,8 % en ETP et pourrait être compensée par le financement des contrats d’alternance ». Cet expert n’exclut pas, toutefois, en échange, « de revendiquer un rôle actif dans le conseil en évolution professionnelle », en sus des cinq opérateurs publics actuels (Pôle emploi, Agefiph, Apec, missions locales, Fongecif, Cap Emploi).

Paritarisme imposé ou choisi librement ?

Enfin quel sera le statut juridique de ces structures ? Resteront-elles paritaires ou tendront-elles vers un autre statut, notamment associatif, les Opca devenant des prestataires de services ? « Il faut rappeler que les Opca sont paritaires en raison d’une obligation de la loi et non par choix des organisations patronales », relève Jean-Marie Luttringer. Dans ce cas, le paritarisme « sera-t-il imposé par la loi ou choisi librement par les organisations patronales et syndicales de salariés concernés »?

Se posera alors, toujours selon cet expert, « la question du respect du droit de la concurrence au regard de la position des opérateurs de compétences », prestataires de services « bénéficiaires d’une contribution de nature fiscale alors que d’autres opérateurs de marché sont en capacité d’assurer les mêmes services dans le respect de la concurrence ». Soit un véritable casse-tête. Réponse début 2020.

La CPME a obtenu le rejet de la carte européenne de services

Le 21 mars, la commission « marché intérieur » a voté contre la carte européenne de services, qui introduisait le principe du pays d’origine, source de dumping social en Europe.

La commission parlementaire « marché intérieur » du Parlement européen vient de voter à une large majorité le rejet des propositions de la Commission européenne sur la carte européenne de services, rejet que la CPME prône depuis 2 ans.

En effet, sur la base de la législation de son seul pays d’origine, cette carte électronique aurait permis à une entreprise d’effectuer une prestation ou de s’implanter dans un autre pays, sans que ce dernier puisse procéder à des contrôles effectifs. Ce système était source de dumping social, fiscal et réglementaire pour les PME. La CPME s’est mobilisée pour obtenir le retrait du texte et se félicite aujourd’hui de cette victoire pour les PME.

Bpifrance Université, des formations en ligne gratuites pour les chefs d’entreprise

La banque publique d’investissement propose une plateforme de formations sur mesure, qui ciblent les préoccupations quotidiennes des entrepreneurs.

Pilotage, développement des ventes, sécurité juridique… : au quotidien, les chefs d’entreprise ou les créateurs en devenir doivent faire face à de nombreux défis et prendre des décisions importantes. Pour les aider, la banque publique d’investissement Bpifrance propose une plateforme de formations en ligne et à la demande, accessibles gratuitement : Bpifrance Université.

 

De la stratégie au management

Ces formations se présentent sous la forme de modules thématiques et pratiques, sur des sujets de préoccupation quotidienne des entrepreneurs :

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  • croissance,
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Conforter les décisions des chefs d’entreprise

« Chaque module, d’une durée de 30 minutes, est segmenté en séquences vidéos de 4 à 6 minutes, dans lesquelles l’apprenant peut se déplacer de manière interactive », précise Bpifrance. Les formations sont conçues avec des experts internes de Bpifrance, des consultants spécialisés ou encore des professeurs de grandes écoles. De nouveaux modules sont mis en ligne régulièrement. L’objectif de Bpifrance avec cette plateforme : « mettre à disposition, gratuitement, des connaissances fiables, opérationnelles et de haute qualité (…) pour orienter [les] réflexions [de l’entrepreneur] (…) et conforter ses décisions ».

Comment ça marche ?

  1. Rendez-vous sur le site de Bpifrance Université.
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Consultez l’article sur economie.gouv.fr.

Délais de paiement : les pouvoirs publics doivent se donner les moyens d’être exemplaires

A l’occasion de la prochaine parution du rapport de l’Observatoire des délais de paiement, la CPME souhaite rappeler l’importance de cette question pour les TPE et PME, souvent victimes de retards abusivement longs.

Certains grands donneurs d’ordre publics ou privés n’hésitent pas, disons-le, à se faire de la trésorerie sur le dos de leurs fournisseurs. Ces pratiques, loin d’être anecdotiques, engendrent un déficit de trésorerie estimé, chaque année, à 16 milliards d’euros pour les PME. Le résultat est là : 25% des défaillances d’entreprises sont directement liés à des retards de paiement.

Dans ce contexte, il est important de veiller à mettre en cohérence les actes et les discours. La pratique du « name and shame », qui permet de rendre public le nom des entreprises ayant un mauvais comportement avec leurs fournisseurs fait en effet apparaitre que plusieurs grandes entreprises épinglées sont signataires de la Charte « Relations Fournisseurs Responsables ».

La CPME, quant à elle, préconise le système de nantissement des créances publiques auprès des organismes sociaux. En clair, une entreprise pourra faire valoir ses créances sur des organismes sociaux pour diminuer d’autant les cotisations qu’elle doit. Cette mesure expérimentée en Guyane a fait ses preuves. Il est maintenant souhaitable de l’étendre à tout le territoire national.

Les pouvoirs publics doivent se donner les moyens d’être exemplaires.